« Vivre avec 411 euros par mois. Manger, s’habiller, se laver, se chauffer, parfois se déplacer. 411 euros, c’est ce que touche une personne seule, allocataire du RSA-socle : moitié moins que le seuil de pauvreté. Le filet ultime qu’une société civilisée accorde à ses citoyens les plus fragiles car elle estime indigne de les abandonner. Qui peut, en toute rigueur, pour ne pas parler d’humanité élémentaire, prétendre que ces gens sont des privilégiés ? » s’interroge Nicolas Demorand dans Libération. Après les propos de Laurent Wauquiez, qui avait stigmatisé le « cancer » de l’assistanat, Jean-François Copé a récemment proposé que certains allocataires du rSa travaillent cinq à dix heures au service d’une collectivité. « Electoralement, ça peut payer, c’est même l’objet de la manœuvre, continue Nicolas Demorand. Philosophiquement, se dévoile aussi à travers ces débats «sans tabous» l’image de la société idéale pour la droite : douce, infiniment douce avec les plus riches, qu’un ISF simplement raisonnable pourrait heurter ; compréhensive, tellement compréhensive avec les exilés fiscaux qui ont bien le droit d’échapper à leurs devoirs ; mais impitoyable, résolument impitoyable, avec les bénéficiaires des minima sociaux, suspects d’être roublards et fainéants».
Des citoyens dans la balance ?
Lors d’une allocution télévisée pour répondre aux préoccupations des Français, le Président de la République a émis le souhait d’instaurer des jurys populaires au sein des tribunaux correctionnels. Entretien avec Me Michèle Girot-Marc, avocate spécialisée en droit pénal et Cédric Ribeyre professeur, entre autres fonctions, à la faculté de droit de Grenoble, pour faire le point.
Quel a été votre premier sentiment à l’évocation de cette annonce ?
M.G-M. : C’est une absence globale de vision et de visibilité de la justice pénale en France actuellement. Une législation démagogique basée sur l’émotion. Le Président de la République a déclenché une guerre ouverte contre les magistrats. Je suis farouchement opposée à cette mise en place de jurys populaires.
C.R. : La surprise d’abord car une telle réforme ne paraît pas urgente et, dans un contexte budgétaire tendu, elle peut coûter cher et s’avérer difficile à mettre en oeuvre. Un sentiment aussi de lassitude devant ce qui laisse penser à une certaine méfiance envers les magistrats. En revanche, il faut reconnaître que le principe d’associer davantage les citoyens à la justice semble tout à fait pertinent.