Léon Jouhaux , l’allumettier devenu prix Nobel de la Paix

« La paix doit être fondée sur la justice sociale et l’amélioration de la condition de la classe ouvrière ». Des décennies plus tard, les propos de Léon Jouhaux sont toujours d’actualité dans une société où les inégalités sont flagrantes. Les voix qui se sont élevées lors des dernières manifestations en sont une preuve. Sans justice, point de paix.

En 1895, âgé de 16 ans, Léon Jouhaux, après avoir obtenu son certificat d’études et préparé l’École des arts et métiers, est embauché d’abord dans une serrurerie avant de rejoindre son père à la manufacture. En 1901, il est condamné à trois mois de prison pour avoir crié « A bas l’armée ! ». Délégué en 1906 au Comité fédéral des bourses du travail, il entre en 1908 au secrétariat de la Confédération générale du travail. Poussé en avant, notamment à cause de son talent oratoire, Jouhaux prend la tête de la C.G.T le 12 juillet 1909 et défend alors les thèses du syndicalisme révolutionnaire.

Lors de la première guerre mondiale, il est commissaire de la nation chargé de la propagande en faveur de la défense nationale dans les milieux ouvriers. Il le fit loyalement tout en continuant à défendre les intérêts ouvriers. À l’armistice, il déclarait qu’il fallait « en finir avec la politique du poing tendu » et que la C.G.T devait être «  présente partout où se discutaient les intérêts ouvriers », la « politique de la présence » restant sa règle durant l’entre deux guerres. En décembre 1918, face au refus de Clemenceau de constituer un Conseil de l’économie, il créa, avec la C.G.T et d’autres organisations, le Conseil économique du travail qui élabora un plan de direction de l’économie. Léon Jouhaux avait aussi une autorité considérable, que ce soit au sein de la Conférence de la Paix, où il fit inscrire la constitution de l’Organisation Internationale du Travail, ou au sein de la CGT qu’il réussit, pendant 15 ans, à maintenir hors de l’emprise du Parti communiste. En 1947, en désaccord avec les positions de la C.G.T et la main mise du PCF sur le syndicat, il crée la CGT-Fo tout en défendant sans cesse les principes de la Charte d’Amiens, qui prônent l’indépendance syndicale vis-à-vis des partis politiques, de l’Etat et de l’Eglise.

Son combat syndical ne peut être dissocié de sa lutte pour la paix. Après la seconde guerre mondiale, il joua un rôle de conciliation entre les deux blocs. En 1951, pour ses engagements pacifistes, l’Académie suédoise couronna la détermination et le courage du militant ouvrier, qui déclara lors de la cérémonie de remise de son prix Nobel de la Paix : «  Une récompense c’est un point de départ. Le fait que l’on vous récompense pour une action déterminée veut dire que cette action doit être poursuivie avec plus de force encore. »

Léon  Jouhaux en quelques dates :
1er juillet 1879 : Naissance à Aubervilliers   
1895 : Employé à la manufacture d’allumettes de Pantin- Aubervilliers   
1909-1947 : Secrétaire général de la CGT   
1948-1954 : Président de la CGT-Force ouvrière   
10 décembre 1951 : Prix Nobel de la Paix   
28 avril 1954 : Mort de Léon Jouhaux

A lire :
« Situation économique et sociale de la classe ouvrière » – Revue politique etparlementaire, février 1948
« Léon Jouhaux dans le mouvement syndical français », par Bernard Georges et Denise Tintant – Paris, Presses universitaires, 1979.