CAF et RSA : du face à face aux interfaces

Depuis 2009 et la mise en place du RSA, les caisses d’allocations familiales (CAF) jouent un rôle plus important dans la gestion des minima sociaux. En Isère comme dans le reste de la France, cela a demandé la mise en œuvre de nouveaux moyens : humains d’abord, mais aussi technologiques. L’écran de l’ordinateur est devenu une interface incontournable.


En face à face avec les allocataires

Le RSA fait partie des aides publiques en faveur de l’insertion sociale et professionnelle. Le département est le pilote principal de ces actions, mais des changements sont intervenus lors du passage du RMI au RSA. D’autres organismes sont dorénavant aussi impliqués, notamment la CAF et Pôle emploi.
Du côté de la CAF, le principal changement concerne les demandes de RSA. Pour le RMI, la CAF était seulement l’organisme payeur. Avec le RSA, elle est désormais un des lieux où chacun peut venir demander et remplir un dossier. La CAF est aussi l’organisme qui prend la décision d’attribuer ou pas cette aide sociale. Autrement dit, elle est devenue aussi un organisme instructeur.
En Isère, outre la CAF, un ensemble d’associations ainsi qu’une partie des centres communaux d’action sociale (CCAS) peuvent procéder à l’instruction des dossiers, mais la CAF est le principal organisme auprès duquel les demandes sont déposées. Elle traiterait environ 80% des demandes de l’ensemble du département. Etant donné la quantité élevée de dossiers (environ 150 par semaine) et leur complexité, la CAF a dû mettre en place une organisation spécifique.
Pour la personne qui veut déposer une demande, cela se traduit concrètement par une étape désormais incontournable : un rendez-vous dans les locaux de la CAF pour un entretien en face à face avec un
technicien-conseil (voir encadré plus bas). Cet entretien est long, d’une durée d’une quarantaine de minutes (contre une vingtaine pour les autres rendez-vous à l’accueil de la CAF). Il doit en effet permettre de recueillir un ensemble assez vaste de données. Il est aussi l’occasion de rassembler et de vérifier toutes les pièces administratives nécessaires au montage du dossier. Au cours de ce rendez-vous, il est également rappelé au futur allocataire du RSA les « droits et devoirs » qu’il devra respecter.
En comparaison avec le RMI, les données à collecter à propos du demandeur sont plus nombreuses et plus détaillées. Elles concernent notamment des « données socio-professionnelles » qui sont ensuite transmises aux services du département. Elles portent principalement sur l’emploi, la famille et le logement. Toutes ces informations serviront au département pour une autre étape importante, celui du choix du mode d’accompagnement qui sera proposé au nouvel allocataire du RSA.
Pour constituer un dossier au cours de l’entretien à la CAF, le technicien-conseil utilise bien sûr des moyens informatiques. Pour l’instruction du RSA, il dispose d’un petit logiciel qui a été élaboré spécifiquement pour cette prestation : @RSA (voir encadré plus bas). Les autres organismes impliqués dans le dispositif RSA, comme les CCAS, se servent aussi de cet outil pour recueillir et partager des données. La mise en place du RSA a en effet correspondu à un développement de l’informatisation des procédures et des relations avec les usagers de la CAF.

Une informatisation poussée

Le recours à l’informatique vise en général à obtenir une meilleure efficacité dans le travail et une communication plus aisée. Dans le cas de la CAF, l’informatisation a effectivement permis de réduire les délais de constitution et de traitement d’un dossier. Elle facilite aussi tous les jours les relations avec les allocataires. Au cours d’un rendez-vous ou d’un échange téléphonique, le technicien-conseil a quasi instantanément sous les yeux toutes les données concernant la situation de la personne, ainsi que les courriers et tous les documents-papier qui ont été scannés. Les dates et objets des précédents contacts avec cette personne sont aussi mémorisés. Si nécessaire, le technicien-conseil peut en outre consulter sur son ordinateur une base documentaire concernant la législation et la réglementation en vigueur qui se sont complexifiées ces dernières années.
Dans le cas du RSA, toutes les informations ainsi rassemblées et à portée de souris sont indispensables vu la quantité de plus en plus grande de dossiers à traiter. En effet, depuis la mise en place de cette prestation, le nombre d’allocataires a fortement augmenté. En 2011, en Isère, la barre des 25 000 allocataires a été franchie (contre 16 000 bénéficiaires du RMI en 2009). Cette augmentation résulte en partie de l’intégration des ex-allocataires de l’API (Allocation Parent Isolé) dans le dispositif du RSA. Ils sont environ 3500 en Isère. Mais c’est surtout l’instauration du « RSA activité » qui a contribué à la hausse du nombre de bénéficiaires du RSA. Plus de 7000 personnes touchent actuellement ce complément de revenu pour les travailleurs pauvres.
Pour autant, le recours aux nouvelles technologies doit-il être toujours plus développé ?
Actuellement, la CAF cherche à favoriser la communication par Internet et l’automatisation de certaines procédures. Pour le RSA, c’est le cas pour les déclarations trimestrielles de revenu (DTR) que chaque allocataire doit renvoyer pour le calcul de ses droits. En Isère, la CAF doit en traiter entre 8000 et 9000 chaque mois. L’utilisation d’Internet pour les DTR contribue à une nette baisse des coûts de traitement de ces documents et à un gain en efficacité.
La lecture des déclarations-papier est déjà automatisée. Les allocataires de l’Isère envoient actuellement leur DTR à un centre de Toulon qui dispose des moyens informatiques pour les saisir par lecture optique. Si aucune incohérence n’est détectée par rapport aux données déjà mémorisées dans les ordinateurs de la CAF, aucune intervention humaine n’est nécessaire pour le calcul des droits.
Pour les procédures répétitives, l’automatisation est pertinente. La recherche de l’efficience à tout prix pourrait cependant aller à l’encontre de la qualité du service public. L’accueil en face à face et le contact direct par téléphone avec les usagers demeurent irremplaçables. Une informatisation excessive pourrait entraîner une déshumanisation. Dans le cas d’allocataires du RSA, par définition précaires et souvent isolés, et pour toutes les personnes, le maintien de contacts humains est d’autant plus indispensable.

(en illustration : une variation graphique du logo officiel du RSA)