Chômage : la marée haute

Les chiffres se suivent et se ressemblent, l’inversion fantasmée de la courbe n’est même plus un souvenir, et les aveux d’échec ou les larmes de crocodile ne sont qu’une maigre consolation.

Modèle réduit

Florent Manaudou n’est pas le seul à battre des records. Tandis que l’impopularité de François Hollande a pulvérisé celle de tous les présidents précédents, les chiffres du chômage se surpassent également mois après mois. Ainsi, on enregistre 0,8 % de chômeurs en plus sur le mois d’octobre 2014, soit près de 29 000 personnes supplémentaires inscrites à Pôle Emploi.

La presse française ne manque pas de signaler que de l’autre côté du Rhin, le chômage n’a jamais été aussi bas depuis 1990, soit en pleine période de réunification. On sait cependant combien le travail précaire constitue la pierre angulaire des bons résultats allemands. À l’heure où la Fondation Abbé Pierre consacre sa campagne hivernale à la question des travailleurs pauvres, il convient de prendre avec des pincettes les modèles que certains veulent nous vendre comme des solutions miracles.

Mais en sommes-nous encore là ? Pierre Gattaz ne vante même plus le modèle germanique, il se contente d’exiger une suppression de l’ISF en estimant que l’emploi en France en dépend, ce qui est s’apparente à une étrange confusion entre la comptabilité d’une entreprise et celle de son dirigeant. Le million d’emploi promis en échange du Pacte de Responsabilité n’étant évidemment pas au rendez-vous, le patron des patrons ne peut qu’endosser à nouveau son costume de monsieur Plus pour circonscrire les critiques. Comme disait l’autre : « tant que je gagne, je joue ! »

L’argile aux pieds de colosse

L’UMP, de son côté, a beau jeu d’utiliser ses chiffres pour perpétuer l’éternel procès qu’elle fait au Président François Hollande, et cela d’autant plus dans un contexte d’élections internes qui prend des allures de présidentielles. Mais le chômage n’est pourtant pas ce qui préoccupe le plus la Droite française, plus prompte à se déchirer sur la question de l’abrogation d’une loi permettant à des gens qui s’aiment de se marier. Et Nicolas Sarkozy ne peut qu’endosser à nouveau son costume de monsieur Loyal pour satisfaire les appétits de son aile droitière, vantant avec aplomb l’intelligence des foules.

Finalement, ces 29 000 chômeurs de plus arrangent tout le monde. 29 000 nouvelles personnes à stigmatiser, à désigner comme responsables de l’effondrement de l’économie, à suspecter de malversations et d’escroqueries aux indemnités. 29 000 nouvelles personnes venant alimenter les discours sur l’assistanat, concept flou sur lequel Nicolas Sarkozy prétend pourtant vouloir organiser un référendum s’il devait revenir à l’Élysée. Bref, 29 000 nouvelles personnes prises en otage par un sempiternel débat qui les utilise sans jamais parler d’elles.

Et pendant ce temps, des travailleurs sociaux, des associations, des bénévoles et quelques élus locaux oeuvrent, non pas pour changer les choses, mais pour limiter la casse. C’est sur eux que le système entier repose sans même le savoir, trop occupé à se regarder le nombril et le record. Jusqu’à quand ?