« Le Havre » d’Aki Kaurismaki : la ballade des gens de peu

La filmographie d’Aki Kaurismaki est dominée par des oeuvres sombres, le plus souvent pessimistes, avec des personnages issus pour la plupart du temps du prolétariat. Destins tragiques, mis en lumière par l’empathie réelle d’un réalisateur qui fait des losers et des paumés des héros du quotidien.

Son dernier film ne déroge pas à cette volonté de défendre des valeurs de ceux que le sociologue Pierre Sansot appelait « les gens de peu », sauf que « Le Havre » se révèle être plus optimiste que ce qu’il avait réalisé jusqu’à présent. Cette fois-ci nous nous attachons à l’univers d’un écrivain raté, gagnant sa vie comme cireur de chaussures au Havre. Alors que son épouse est à l’hôpital et probablement condamnée, il est amené à cacher un enfant immigré clandestin et à l’aider à aller jusqu’à Londres.

Même si le jeu des acteurs semble assez (et volontairement) théâtral, peu de films ont été aussi vrais que celui-ci. Pas de pathos ou d’effet appuyé, mais une mise en scène minimaliste qui nous porte et nous fait adhérer à ce conte. Là où d’autres optent pour un montage haché, des angles de cadrages redondants, le discret Kaurismaki choisit le plan large, le plan séquence où la lumière est apprivoisée. Il nous donne non pas à voir, mais à regarder, non pas à entendre mais à écouter des dialogues brefs mais justes que de très bons acteurs comme André Wilms ou Jean-Pierre Daroussin se plaisent à faire résonner. Une véritable contemplation à laquelle le spectateur pourra avoir accès via une édition DVD qui vient de paraître.