Retraites: les Grenoblois dans la rue

Grenoble, comme le reste de la France, a connu mardi 12 octobre une nouvelle journée de mobilisation contre la réforme des retraites voulue par le gouvernement de François Fillon.

Sous un beau soleil rayonnant et une température printanière, environ soixante-dix mille manifestants (selon les organisateurs) ont parcouru les grands boulevards de la ville, après être partis du cours Jean Jaurès en milieu de matinée. Trois heures plus tard, la fin du cortège arrivait devant la Préfecture, place de Verdun.  Selon les premiers chiffres, la mobilisation serait supérieure à celle constatée le 2 octobre dernier.

Les principales organisations syndicales étaient représentées tout comme les secteurs professionnels par exemple de la métallurgie, de la santé, de l’éducation, de l’industrie, rejoints cette fois-ci par les lycéens et les étudiants. « Du pognon il y en a dans les caisses du patronat » pouvait-on entendre tout au long de la manifestation.

Bien évidemment, le principal mot d’ordre était le retrait du projet Woerth. Cependant, les revendications des nombreuses personnes qui composaient le cortège étaient diverses et variées. Pour Jacques, enseignant d’une quarantaine d’années, la question des retraites est bien sûr primordiale, mais pas seulement : « ces manifestations sont toujours utiles, elles font parler les gens entre eux et créent du lien social, notamment entre les jeunes et les moins jeunes, la solidarité entre générations doit être importante ». D’ailleurs, beaucoup étaient venus en famille et on a pu voir au cours de cette matinée beaucoup de poussettes, beaucoup d’enfants accompagnés de leurs parents. C’est le cas notamment de Jean, métallurgiste, qui a manifesté avec sa fille, Karine, qui est au lycée. Si le père regrette finalement qu’il n’y ait « pas assez de monde », Karine reconnaît qu’il est difficile pour les lycéens de se mobiliser car « tout ça semble bien loin et il est dur d’en prendre vraiment  conscience ». Les étudiants avaient également rejoint le mouvement, comme Quentin et Clémence, qui estiment que la « mobilisation du campus universitaire va aller crescendo, mais sans doute plus pour exprimer un ras le bol général ». Mais les manifestants pensent-ils réellement que leur action puisse changer véritablement les choses ? A cette réponse, l’exemple du CPE revient sur toutes les lèvres. Pour Mehdi, chercheur en robotique médicale, « cette solidarité, cette énergie qui porte les gens peut faire bouger les choses, comme en 2006 ». Sandrine, dans la même situation que lui, revient sur son propre parcours : « dans ce domaine de recherche, avec un bac + 8, on commence à vraiment rentrer dans la vie active à 30 ans ; en plus, comme on ne trouve pas de travail en France, j’ai du passer deux ans aux Etats-Unis et par conséquent je n’ai toujours pas commencé à cotiser ».

Cette nouvelle journée de manifestation grenobloise est ainsi un succès en ce qui concerne la mobilisation en elle-même. Néanmoins, on pouvait sentir au gré du cortège une certaine résignation, une certaine fatalité quant à l’acceptation du projet de loi. On a connu par le passé une expression beaucoup plus vindicative et enthousiasmée envers les réformes gouvernementales (comme lors du CPE, justement). Faut-il y voir un signe d’essoufflement ou au contraire le calme avant la tempête de la rue ? Certes, dans ce genre de confrontations sociales, le nombre fait souvent la force, mais, de temps à autre, cette impression de routine fait perdre de sa valeur démonstrative à un mouvement qui peut parfois sembler manquer d’actions plus entreprenantes.

 

Quelques-unes des pancartes et banderoles des manifestations du mardi 12 octobre et du jeudi 23 septembre (photos: Nolwenn Tizzoti et Yannick Dufaud)