Richard Ford — Canada

Les Éditions de l’Olivier publient le dernier ouvrage traduit en français de Richard Ford, auteur américain né en 1944, prix Pulitzer en 1996 pour le roman Independance.

« Être jeune, c’était ça le pire. »

Dell Parsons raconte sa quinzième année, cet âge où sa vie a basculé lorsque ses parents, que rien ne semblait prédisposer à cet acte, sont arrêtés après avoir cambriolé une petite banque du Minnesota et qu’une amie de sa mère l’emmène vivre au Canada afin d’échapper aux orphelinats des services de protection de l’enfance états-uniens.

Avec un regard acéré, le narrateur détaille chaque instant de cette étrange aventure, les liens qui unissaient son père et sa mère, couple improbable qui demeura uni jusqu’à l’absurde sans que rien ne permette de l’expliquer, et les liens qui l’unit à sa sœur Berner, sa jumelle qui ne lui ressemble en rien.

Contrairement à ce que son titre – et sa couverture – pourraient laisser penser, Canada ne parle pas de pays ou de paysage. Il n’est pas ici question d’évoquer les vastes étendues du nord des États-Unis ou du pays d’érable qui lui est frontalier. Elles ne sont mentionnées que pour mieux mettre en avant ceux qui les habitent, leur profil et leur psychologie, sans jamais pour autant céder à la facilité du cliché social ou ethnique.

« De tout ce bois, le feu d’une vie. »

Tout personnage est ici perçu comme une individualité et le narrateur dissèque la personnalité de chacun, du plus important au plus anecdotique, comme si le jeune adolescent gravait dans sa mémoire jusqu’aux détails les plus infimes, fasciné par cet épisode de son existence qu’il nous raconte soixante ans plus tard.

Une mise en avant de la psychologie des personnages qui n’est pas rare dans le roman américain et semble ici le sujet même du récit, à tel point que les événements quelquefois remarquables qui nous sont narrés passent presque au second plan. Canada est un roman d’introspection autant que d’apprentissage.

« Beaucoup d’attente et d’anticipation. »

Et le lecteur risque peut-être d’être désarçonné par cette prose chirurgicale, par cette obsession du détail qui ne rend pas nécessairement hommage au récit et l’alourdit parfois au-delà du raisonnable. La musique du roman s’inscrit dans la lenteur, mais elle ennuie plus qu’elle ne berce.

Le narrateur lui-même semble souvent apathique, comme si l’introspection empêchait le ressenti. Et l’on regrette alors que l’émotion réelle, poignante, qui se dégage de la conclusion du récit, pleine de beauté comme de tristesse, ne soit pas plus présente durant les quatre-cent pages qui la précède.

On ne saurait nier les qualités littéraires de l’ouvrage et encore moins en déconseiller la lecture, mais force est de reconnaître toutefois que Canada est un roman qui se lit avec plus d’intérêt que de plaisir.

20131206 canada1Canada
de Richard Ford
Éditions de l’Olivier
482 pages, 22,50€

Canada, de Richard Ford

Les Éditions de l’Olivier publie le dernier ouvrage traduit en français de Richard Ford, auteur américain né en 1944, prix Pulitzer en 1996 pour le roman Independance.

« Être jeune, c’était ça le pire »

Dell Parsons raconte sa quinzième année, cet âge où sa vie a basculé lorsque ses parents, que rien ne semblait prédisposer à cet acte, sont arrêtés après avoir cambriolé une petite banque du Minnesota et qu’une amie de sa mère l’emmène vivre au Canada afin d’échapper aux orphelinats des services de protection de l’enfance états-uniens.

Avec un regard acéré, le narrateur détaille chaque instant de cette étrange aventure, les liens qui unissaient son père et sa mère, couple improbable qui demeura uni jusqu’à l’absurde sans que rien ne permette de l’expliquer, et les liens qui l’unit à sa sœur Berner, sa jumelle qui ne lui ressemble en rien.

Contrairement à ce que son titre – ou sa couverture – pourrait laisser penser, Canada ne parle pas de pays ou de paysage. Il n’est pas ici question d’évoquer les vastes étendues du nord des États-Unis ou du pays d’érable qui lui est frontalier. Elles ne sont mentionnées que pour mieux mettre en avant ceux qui les habitent, leur profil et leur psychologie, sans jamais pour autant céder à la facilité du cliché social ou ethnique.

« De tout ce bois, le feu d’une vie. »

Tout personnage est ici perçu comme une individualité et le narrateur dissèque la personnalité de chacun, du plus important au plus anecdotique, comme si le jeune adolescent gravait dans sa mémoire jusqu’aux détails les plus infimes, fasciné par cet épisode de son existence qu’il nous raconte soixante ans plus tard.

Une mise en avant de la psychologie des personnages qui n’est pas rare dans le roman américain et semble ici le sujet même du récit, à tel point que les événements quelquefois remarquables qui nous sont narrés passent presque au second plan. Canada est un roman d’introspection autant que d’apprentissage.

« Beaucoup d’attente et d’anticipation. »

Et le lecteur risque peut-être d’être désarçonné par cette prose chirurgicale, par cette obsession du détail qui ne rend pas nécessairement hommage au récit et l’alourdit parfois au-delà du raisonnable. La musique du roman s’inscrit dans la lenteur, mais elle ennuie plus qu’elle ne berce.

Le narrateur lui-même semble souvent apathique, comme si l’introspection empêchait le ressenti. Et l’on regrette alors que l’émotion réelle, poignante, qui se dégage de la conclusion du récit, pleine de beauté comme de tristesse, ne soit pas plus présente durant les quatre-cent pages qui la précède.

On ne saurait nier les qualités littéraires de l’ouvrage et encore moins en déconseiller la lecture, mais force est de reconnaître toutefois que Canada est un roman qui se lit avec plus d’intérêt que de plaisir.