André le géant

Il mesurait deux mètres trente et pesait un quart de tonne. Il a dominé l’industrie du catch pendant dix ans et tourné dans des films à Hollywood. Box Brown nous invite à découvrir l’histoire de ce géant, André Roussimoff.

« Kayfabe », ce terme provient du monde du catch et désigne l’illusion tissée autour de ce sport, l’idée que les combats seraient réels – pour le plus grand plaisir des spectateurs.
André Roussimoff, Grenoblois de naissance à en croire certaines sources, a vécu l’essentiel de son existence sous ce principe, sans doute davantage que n’importe quel autre catcheur tant ses vies privée et professionnelle se confondirent.

À douze ans, André mesurait déjà un mètre quatre-vingt dix mais ce n’est qu’à vingt-quatre ans que son acromégalie est diagnostiquée ; une maladie rare qui entraîne une production constante, toute la vie durant, de l’hormone de croissance. Le pronostic est sans appel : son corps va gagner constamment en taille et en masse jusqu’à dépasser les capacités de son cœur à l’irriguer correctement et de son ossature à le supporter. Le médecin qui l’examine estime qu’il ne vivra pas au-delà de quarante ans – une existence graduellement envahie par la souffrance à cause de la pression croissante exercée sur ses articulations et sa colonne vertébrale.
Mais à la douleur physique s’ajoutent celle, plus subtile, de vivre dans un monde trop petit pour lui et celle, plus cruelle, d’être un homme piégé dans le corps d’un géant à qui les autres Hommes rappellent constamment qu’il est différent.

Incapable de s’intégrer à la « normalité », André va aller là où l’extraordinaire constitue la norme. Dans le catch, son apparence et ses capacités physiques lui permettront de devenir une légende mais surtout, ce monde l’accueillera et lui offrira une forme d’intégration à la société ; une illusion de normalité lorsque les regards qui se poseront sur lui seront émerveillés et enthousiasmés plutôt qu’inquiets ou de rejet. André se dévouera tout entier à ce milieu ; même s’il s’en éloignera à quelques reprises pour tourner dans des films, il participera au kayfabe presque jusqu’au bout, ne s’arrêtant qu’en 1992, un an avant sa mort causée par une crise cardiaque. Il avait quarante-six ans.

Box Brown, passionné de catch, a mené un véritable travail de recherche, s’appuyant sur des sources et une documentation solides (il propose d’ailleurs une bibliographie du matériel qu’il a utilisé à la fin du livre), pour nous livrer cette « bio graphique » d’un homme qui avait un corps de géant et restera ainsi dans la mémoire mais n’en était pas moins humain. Vulgarisateur (il fournit également un glossaire des termes de catch employés), il s’est assuré que sa bande dessinée ne serait pas réservée aux seuls passionnés mais que tous pourraient découvrir la vie du géant, s’enthousiasmer et s’émouvoir – quand bien même le lectorat de l’Hexagone sera parfois un peu décontenancé par les tournures de phrase, l’occasion de se rappeler que le français est également parlé au Québec, pays natal des éditions « La Pastèque » qui nous proposent ce beau livre.

 

André le Géant
Box Brown
Éditions la Pastèque
240 pages / 19 €