D’ici peu, la question des réfugiés climatiques se posera au monde entier. Avec Terre !, Olivier Spony l’écrit et la met en scène sous l’angle de la mystique autant que de la satire.
Quand l’océan s’éveillera
« Toi, tu viens du malheur, tu viens de la misère… » Ellen est une rescapée climatique. Elle fait partie de ces enfants et adolescents contraints de fuir leur île submergée par l’océan, malgré les imprécations de sa sorcière. Et Ellen se retrouve en France, adoptée par un couple bourgeois qui voulait « aider quelqu’un de malheureux à la télévision ».
Mais le couple en question espérait adopter un jeune enfant, pas une adolescente au passé empli déjà d’images, de sentiments et de sensations. Si, au début, ses parents adoptifs font tout pour témoigner de leur bonne volonté, abreuvant Ellen de discours dégoulinants faits de mauvaise conscience occidentale et de clichés d’amour et de tolérance, une certaine réalité des cœurs refera vite surface.
La terre ment
Olivier Spony signe un texte délicieusement cruel dont les scènes les plus cyniques sont aussi celles qui font le plus rire, d’un rire jaune-noir et dérangé. Les obsessions, les névroses d’un couple qui se veut tellement parfait et explose au contact d’une adolescente pourtant aimable et discrète, donnent lieu à des dialogues et des réparties finement ciselés — « l’homme est un tsunami pour l’homme —, dessinés à la pointe du couteau.
Entre l’amour tellement affecté de la mère pour son bébé, les désirs inavouables et de moins en moins inavoués d’un mari pour sa fille adoptive ou les visites d’une assistante familiale circonspecte face à un couple si intimement désuni, cette satire de nos sociétés bien-pensantes réjouira les mauvais esprits autant qu’elle bousculera – c’est pour leur bien – les autres.
Si le jeu de la jeune troupe qui défend la pièce peut se montrer par instants encore un peu vert, il sait offrir au spectateur beaucoup d’audace, d’énergie mais aussi et surtout de véritables moments de grâce. Colères homériques, sentiments rentrés, tensions palpables ou délicates, et une Ellen campée avec finesse et sensibilité, Terre ! est un réservoir de talents à venir applaudir.
Terre !
Écrit et mis en scène par Olivier Spony
À l’Atelier du 8, 2 rue Raymond Bank, Grenoble
Les 27 et 28 mars, 3 et 4 avril à 20 heures,
Le 29 mars et le 5 avril à 18 heures.
Entrée : 5 euros / 7 euros
Renseignements et réservations au 06 10 66 41 61