Humains avant tout

Combattants, premier tome du Printemps Humain, ou comment l’humanité prendra les armes contre des créatures venues d’une autre planète pour asservir la sienne.

Les Mystères de la Kasba

« Un vrai travail, c’est plus utile qu’un rêve ». Voilà la philosophie des Orts, peuple extraterrestre dominant la Terre et les « Sapiens » qui la peuplent. Des humains acceptant pour la plupart leur asservissement, et considérant – peut-être à juste titre – que les Orts les ont sauvé du désastre écologique ou des guerres de religion dans lesquels ils se complaisaient.

Mais l’oppression des Orts est sans pitié, elle nie l’Histoire même des humains, et maintient ses sujets dans l’ignorance et la pauvreté, à l’exception de ceux qui ont choisi de collaborer et ont su s’imposer dans le petit cercle des interlocuteurs privilégiés. Une domination d’autant plus nécessaire que les Orts sont en guerre et en concurrence économique avec d’autres planètes de l’Empire.

Pendant ce temps, dans le quartier populaire de la Kasba, la révolte gronde. Une pièce de théâtre mettant en scène une certaine bergère partant libérer son peuple après avoir entendu des voix émeut les cœurs des spectateurs, et nourrit une volonté d’émancipation. Des cultes clandestins apparaissent, de même qu’une armée de révolutionnaires bien plus préparée que les Orts ne le soupçonnent.

 

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Retour vers le futur antérieur

Hugues Micol joue avec les codes et les époques. Si la société humaine qu’il décrit est totalement coupée de son passé, ne conservant qu’une historiographie où toutes les époques se mélangent, son récit lui-même semble faire le grand écart entre science-fiction et tradition gouailleuse. Sa Kasba a des allures parfois d’un Paris des Misérables, où Petite Monnaie évoquerait un Gavroche du futur.

Un grand écart que l’on retrouvera dans l’approche esthétique même de l’album, où l’auteur représente les extraterrestres, leur technologie et leur architecture, en privilégiant des jeux de formes et de couleurs qui rappelleront volontiers la science-fiction des années 70, le style Moebius en tête. Une luxuriance qui contraste avec les quartiers où résident le bas-peuple, aux pavés toujours aussi ternes quelles que soient les bottes qui les martèlent.

Si le récit que nous délivre Hugues Micol ne se distingue pas spécialement par son originalité, on appréciera toujours son énergie et sa fraîcheur, quand bien même elle confine quelquefois à la naïveté, sinon pire. Ce premier tome du Printemps Humain s’adresse avant tout aux amoureux – sinon aux nostalgiques – d’une certaine tradition de la science-fiction qui a su, de Planète Interdite à Soleil vert, charmer bien des cœurs. Et en laisser d’autres perplexes.

 

20150506 printempshumain4Le Printemps Humain
1. Combattants
De Hugues Micol
Éditions Casterman
56 pages, 14,50 €