Le plan pauvreté, 1ère partie : les constats

Olivier Noblecourt, délégué interministériel à la prévention et à la lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes était à Grenoble lundi 10 décembre pour présenter le nouveau plan pauvreté.

Rendu public en septembre, le Plan Pauvreté a beaucoup fait parler de lui. Cette présentation par le délégué interministériel à la lutte contre la pauvreté tombait donc à point. Le Bon Plan vous en présente une restitution en deux volets : les mesures puis les constats.

Le plan pauvreté présenté à Sciences Po Grenoble puis à l’Institut de formation du Travail Social (IFTS) se décline en 4 axes :

 

• Action pour la petite enfance

• Accompagnement des jeunes et des bénéficiaires du RSA vers l’emploi

• Simplification du système social

• Résorption des bidonvilles concernant le logement

 

Olivier Noblecourt a rappelé le montant total dédié au financement de cette politique se voit attribuée un budget de 8,8 milliards d’euros sur quatre ans, « somme montant en charge tous les ans, et représentant trois fois plus que le dernier budget ». Les contrats seront désormais passés directement avec les collectivités territoriales et les institutions, (notamment Sécurité Sociale) afin d’être au plus près des réalités du terrain. Avant de présenter le Plan Pauvreté lui-même, Olivier Noblecourt fait un point sur le contexte de son élaboration et fait un constat sans appel : le pays vit un moment douloureux et fait face à une forte urgence sociale.

Devant les étudiants et enseignants de l’IFTS, il explique vouloir remettre le travailleur social au centre des politiques sociales, faisant le constat d’une distance croissante entre les travailleurs sociaux et leur public, que l’on peut imputer aux baisses de budgets (et donc d’effectifs de travailleurs sociaux) ainsi qu’à la dématérialisation. Le Résultat sans appel lui aussi : Olivier Noblecourt parle de « gangrène de la défiance », générée par les limites du modèle social actuel.

 

Un modèle social limité

Ces limites se manifestent sous trois formes:

Des garanties collectives qui ne répondent pas aux nouveaux types de pauvreté. Le vingtième siècle comporte de nouvelles formes de pauvreté, pour lesquelles le modèle de protection social français n’est pas adapté : familles mono-parentales, personnes âgées, pauvreté des jeunes…). Ces « nouveaux pauvres » sont amenés à devoir défendre la particularité de leur situation, et donc exposer leurs souffrance. Le statut social est vécu avec le sentiment que « l’autre » décide pour soi. Cela entame grandement la confiance de ces publics. 

Un délaissement des politiques d’accompagnement. La loi prévoie que 20% du budget dédié aux allocations est consacré à l’accompagnement. Dans les faits ce chiffre est seulement de 7%. Avec moins d’accompagnement, les allocataires sont encouragés à être plus autonomes… Mais il y a là une contradiction. Si l’objectif est la responsabilisation, le résultat est la culpabilisation, avec des personnes pauvres facilement perçues comme des assistés.

Une reproduction sociale toujours aussi forte. La lutte contre la reproduction sociale des inégalité est très complexe, notamment parce que ce phénomène est dû pour une large part aux stratégies de différenciation des couches aisées de la population. Le but, toujours selon Olivier Noblecourt, c’est que l’on puisse dire sans mentir que « quand on travaille dur, on s’en sort bien. » La reproduction sociale est effective très tôt, dès le CP : « A six ans, il y a déjà 1000 mots d’écart entre un jeune issu d’un milieu aisé et un autre issue d’un milieu défavorisé. »

 

La « Grangrène de la défiance »

L’écart se creuse entre institutions, travailleurs sociaux et personnes accompagnées. Olivier Noblecourt rappelle la nécessité de modifier l’approche des politiques publiques en modifiant la posture des travailleurs sociaux afin de rompre la défiance mutuelle. Cela se fera en mettant en avant la relation d’accompagnement. Par exemple, le délégué expose l’objectif de doubler le nombre de bénéficiaires des dispositifs d’Insertion par l’Activité Economique (IAE), en passant de 100 000 à 200 000 personnes.

La volonté affichée est de « recréer un service public de l’insertion », dans lequel l’accompagnement se mettrait au service du projet de vie de la personne plutôt que de chercher à le faire entrer dans une case.

En ce qui concerne les bénéficiaires du RSA, la distinction des parcours social et professionnel sera remise en cause d’après le constat du manque de son efficacité. Une fusion de plusieurs allocations est envisagée : le RSA, la prime d’activité… Cela permettra de limiter le non recours et simplifiera les démarches des bénéficiaires.

Retrouver le plan pauvreté, ici