Patricia Dinet : l’aide aux aînés

À 52 ans, Patricia Dinet a eu plusieurs vies. Femme au foyer, technicienne informatique et maintenant auxiliaire de vie, principalement auprès de personnes âgées : un métier vocation pour cette femme de caractère.

Une jeune mère

Originaire de Grenoble et amoureuse des montagnes, Patricia Dinet a un parcours atypique. Mariée à 18 ans et mère à 20 ans, elle va être femme au foyer jusqu’à son divorce à 26 ans :  » Je me suis séparée de mon mari – qui refusait que je travaille – car je ne voulais pas rester toute ma vie dépendante d’un homme. »

Pour la jeune femme, qui doit aussi s’occuper de ses deux enfants, c’est le saut dans l’inconnu. Elle enchaîne des petits boulots dans la restauration, et à la faveur d’une opportunité, intègre HP en tant que technicienne polyvalente. Formée par l’entreprise, elle va y rester 10 ans : « J’ai vu évoluer les supports d’information, de la bande de données aux CD ».

L’arrivée d’Internet, dans les années 2000, entraîne des licenciements massifs. Patricia Dinet perd son emploi. Cette période correspond aussi à un nouveau congé parental à l’issue duquel elle fait un bilan de compétences qui l’oriente vers la sphère sociale et relationnelle.

Le goût pour la relation

Après une première formation d’employée de maison, elle va poursuivre avec un Certificat de Qualification Professionnelle d’Assistante de Vie (CQPAV) et va découvrir et aimer l’univers des personnes âgées et le métier d’auxiliaire de vie : « La toilette, l’hygiène, c’est le minimum… Ce travail, du début jusqu’à la fin, c’est de la psychologie. »

Face à la maladie psychique comme celle d’Alzheimer, Patricia Dinet « rentre dans le jeu des personnes pour les ramener à la réalité progressivement, sans les brusquer ». Quand une dame refuse de prendre les médicaments en expliquant que Mme Chirac les lui a déjà donnés, elle lui répond que c’était ceux d’hier et qu’elle va lui donner ceux d’aujourd’hui. Quand une autre achète, chaque jour, les cigarettes de son mari, décédé depuis plusieurs années, elle va voir le commerçant et l’aide à trouver la réponse à apporter.

L’adaptation bienveillante

Avec chacun(e), elle s’adapte avec patience et tolérance. Ces qualités, elle les a développées grâce à l’un de ses fils, atteint d’un handicap psychique qui provoque des idées envahissantes. Elle a dû chercher à comprendre les angoisses – semblant irrationnelles – de son enfant, comme cette peur panique à chaque fois qu’elle éclatait de rire. Avec la psychiatre qui l’aide à accompagner son fils, elle comprendra qu’il avait pris au premier degré l’expression « J’étais morte de rire ». Elle lui expliquera alors avec pédagogie que tous les mots n’ont pas toujours leur sens premier.

Comprendre l’autre pour l’apaiser, c’est un de ses leitmotivs, qu’elle essaie de transmettre à ses collègues :  » Arrêtez de lui mettre son fauteuil devant la porte de sa chambre : la nuit, elle rêve qu’elle fait de longues marches en forêt. Mettez le plus loin, qu’elle oublie son fauteuil, au moins sur le temps du réveil. »

Des situations complexes

Au-delà du confort, elle doit parfois faire face à des situations complexes, la maltraitance notamment, qui peut venir même des aidants familiaux, à l’image de cette fille qui avait vécu des attouchements enfant et qui, à l’âge adulte, maltraitait son père impotent. Si cet exemple constitue un cas extrême, les relations avec la famille sont une des composantes du travail de Patricia Dinet qui joue souvent un rôle de médiateur « tampon » : les aidants familiaux peuvent se décharger du trop-plein et les personnes âgées, qui ont souvent la peur de gêner, se confient plus facilement à elle.

La maturité nécessaire

Quand on évoque les différents aspects de la profession, Patricia Dinet insiste : « Ce métier nécessite de la maturité et une certaine force de caractère : il faut être en capacité d’affronter la souffrance des gens, la vieillesse, la mort ». Elle évoque aussi le manque de reconnaissance sociale de ce métier d’aide, « réservé » dans les années 75/80 aux personnes sortant de prison, et encore souvent choisi par défaut.

Si Patricia Dinet aime son travail, elle concède que la gestion des trajets risque de devenir trop lourde le temps passant. C’est pourquoi elle envisage d’aller travailler en maison de retraite, mais d’abord de se former comme Aide médico-psychologique. Mieux connaître pour mieux accompagner, une motivation permanente pour cette femme profondément aidante.