La belle gueule de l’emploi

 

33 ans, blanc de peau, patronyme et prénom français, physique avenant, diplômé et sans enfant. Voilà actuellement le profil idéal d’un candidat à l’emploi. Que faire de ces critères qui ne sont pas des compétences ?

Animé par un esprit de contradiction, il est tentant de prendre la question des discriminations à rebours. En effet, pourquoi pas les discriminations ? Parce que si en premier lieu  » discrimination  » évoque la notion d’exclusion, elle n’en demeure pas moins synonyme de choix. Et des choix, nous en faisons tous les jours, en choisissant les gens avec qui nous vivons, ceux avec qui nous pratiquons nos loisirs, etc. Tout cela de façon subjective et en accord avec nos affinités personnelles. Mais inversement, dans le contexte de l’emploi, c’est nous qui sommes choisis et le modus operandi de ces choix peut nous interroger. La France est un pays animé depuis longtemps, du fait de la Déclaration des droits de l’homme, par le principe d’égalité. Malheureusement, il y a parfois des écarts entre les principes et la réalité. Et dans le cadre de l’accès à l’emploi, le législateur s’est adapté au marché du travail pour atteindre l’égalité des chances. Mais malgré l’arsenal législatif, certaines personnes souffrent encore de préjudices. Les choses ne sont donc pas si simples pour conduire un recrutement.
Comme ne manque pas de le souligner Muriel Gallo, professionnelle de la fonction RH (ressources humaines), le recrutement est une étape complexe. En effet, bien que le responsable RH suive scrupuleusement une grille de lecture de compétences, il va parfois faire des choix sans en être conscient. Dans un premier temps, il va éliminer une série de profils qu’il va juger ne pas correspondre à l’intérêt de l’entreprise. Ensuite, des candidatures vont être écartées par rapport à des données que l’on nomme  » aléatoires  » et qui sont du ressort de la personnalité du RH. Dans ces données variables interviennent les stéréotypes et tout ce qui est propre à notre culture, notre éducation, et dont nous sommes empreints. De là, résulte le fait que certains visages vont nous sembler plus sympathiques que d’autres. De la même manière, des expériences négatives avec certains groupes ethniques ou religieux vont nous conduire à des attitudes critiques à leur égard. Ce choix, qui va impacter lors de l’accès à l’emploi, est une question de culture, mais aussi de rapport à soi, à ses croyances et à son vécu. La subjectivité de la sélection est démultipliée lorsque interviennent plusieurs recruteurs en même temps. Au final, malgré le cadre légal, il s’agit toujours d’un être humain qui choisit un autre être humain.Trop Vert

Il semblerait que les personnes au physique avenant bénéficient de considérations meilleures au cours de leur vie. Ainsi, il est statistiquement reconnu que les coupables au faciès agréable écopent de peines de prison moins lourdes. De même, les hôtesses des salons automobiles sont toujours jolies. Alors, bien que les recruteurs soient censés respecter la loi, un physique agréable, la couleur de la peau, une origine ethnique sont-ils des compétences ? Dans les années 2000, les procès très médiatiques qui mettaient en avant des pratiques discriminatoires au sein des entreprises Adecco ou Ikea montrent que la conscience collective est en pleine mouvance, et qu’à force d’éducation et de prévention, les préjugés et autres stéréotypes s’estompent peu à peu.