Archives du Bon Plan / La parole retrouvée

Dans son numéro 124/125 spécial 20 ans, le Bon Plan a inclus d’anciens textes publiés quelques années auparavant, représentatifs de la ligne éditoriale de notre journal et de son évolution. Nous retrouvons ici un texte de Michèle Caron qui figurait dans Le Bon Plan n° 32 en juin 1995.

 

La parole retrouvée

Tous nous connaissons les affres de la solitude, de l’isolement lorsque l’être aimé, la santé, le travail, un jour, avec ou sans préavis nous échappent. Le cadre éclate, le miroir se brise, notre image se décompose… Nous devenons alors étrangers pour nous-mêmes et pour les autres. Les repères s’effacent, le trouble s’installe… Le cordon ombilical est à nouveau sectionné. L’existence se vide de son sens. Nous nous égarons dans des questionnements incessants.
Nous perdons confiance en nous, en tous, en tout. Un nouveau monde se crée, le nôtre, ténébreux, impénétrable. La marge entre les autres et nous se creuse chaque jour un peu plus.

Alors le sentiment d’être incompris se renforce.

Trahis une première fois, nous rejetons les structures sous toutes leurs formes.
Que pourraient comprendre ces gens, bien intentionnés par ailleurs, à notre perte du quotidien ?
Ces hommes et ces femmes emportés, asphyxiés par leur course contre le temps.
Prisonniers de l’urgence, ils le sont aussi de l’autorité qui sévit à chaque étage.

La défiance s’installe.
J’ai emprunté ces couloirs qui ne conduisent nulle part. J’ai vécu ces files d’attente où la lassitude l’emporte sur l’espoir.
Sentant poindre la nuit dans sa noirceur irréversible, nostalgique du temps des rires, j’ai retrouvé la PAROLE. C’est alors que, graduellement, le cadre s’est reformé, le miroir rassemblé et l’image recomposée.

J’ai emprunté une nouvelle fois un couloir. Au bout du couloir, une porte, derrière la porte quelqu’un m’attendait.
Par chance, la personne avait l’ouïe fine et me voilà devant vous : longue paraphrase pour vous dire que Le Bon Plan ouvre ses portes très grandes.
Il faut que vous veniez, que vous veniez nous dire…
Vous rencontrerez des gens que vous connaissez peut-être déjà.
Mais ce jour-là, ce sera en direct, sans agenda, sans barrage, j’oserais dire sans uniforme.

Il est urgent de recréer le lien, de rétablir une confiance mutuelle entre nous qui cherchons et ceux qui cherchent pour nous mais pas sans nous…